Auteurs

Sophie Pignon

Associé

Read More

Damien Kebdani

Collaborateur

Read More
Auteurs

Sophie Pignon

Associé

Read More

Damien Kebdani

Collaborateur

Read More

25 juillet 2022

ENR : changement de braquet face à la hausse des tarifs de l’électricité

  • Briefing

En réaction à la hausse durable des tarifs de l’électricité sur le marché, le Gouvernement a introduit dans le projet de loi de finances rectificative pour 2022 (PLFR) un article 13 prévoyant le déplafonnement des remboursements à EDF en cas de prix de marché supérieur au tarif de référence… avec un effet rétroactif.

Une nouvelle fois, les règles du jeu en matière d’ENR pourraient être remises en cause par l’Etat en cours d’exécution des contrats de soutien aux filières ENR. En fin d’année 2020, ce sont les contrats d’obligation d’achat de la filière solaire qui avaient été ciblés (cf. Coup de chaud sur la filière photovoltaïque) avec la réduction rétroactive du tarif d’achat pour les contrats conclus sous l’empire des arrêtés tarifaires de 2006 et 2010. Cette mesure, mise en œuvre en 2021 (cf. Révision des tarifs applicables au solaire : le décret et l’arrêté enfin publiés !), marquait le début d’une forme de chasse aux surprofits potentiels des producteurs d’électricité.

 

Au tour des contrats de complément de rémunération

Cette dynamique s’est poursuivie à la fin de l’année dernière en visant, cette fois, les contrats de complément de rémunération. Pour ces contrats, le soutien aux producteurs prend la forme du versement mensuel d’une prime à l’énergie correspondant à la différence entre un tarif de référence de l’énergie produite et un prix de marché représentatif de la valorisation de l'électricité produite sur les marchés de l'électricité. La prime peut donc être positive (et donc donner lieu au versement d’un complément au producteur) ou négative. Dans ce dernier cas, le producteur a l’obligation de payer la différence à EDF. Mais l’article R. 314-49 du code de l’énergie précisait que cette obligation ne s’entendait que dans la limite « des montants totaux perçus » par EDF depuis le début du contrat. En d’autres termes, une fois les montants reçus par EDF remboursés, le producteur pouvait donc pleinement bénéficier du prix de marché supérieur.

Par un décret n° 2021-1691 du 17 décembre 2021, le plafond des remboursements dus à EDF a été supprimé dans un contexte de hausse durable du prix de l’électricité sur le marché. Cette évolution, qui suit la modification dès 2019 des cahiers des charges applicables aux contrats de complément de rémunération conclus après mise en concurrence, prive donc les producteurs du bénéfice d’un prix de marché supérieur pendant toute la durée du contrat. Toutefois, cette modification règlementaire ne s’applique pas aux contrats en cours (cf. Complément de rémunération en guichet ouvert).

 

Nouveau tournant

Après la modification opérée par le décret du 17 décembre 2021, il pouvait être craint qu’une application rétroactive de la mesure soit envisagée par le législateur. C’est ce que prévoit l’article 13 du PLFR pour l’année 2022 :

  • « Pour les contrats offrant un complément de rémunération conclus en application des articles L. 311-12 et L. 314-18 du code de l’énergie, dans les cas où la prime à l’énergie mensuelle est négative, le producteur dont le contrat stipule qu’il est redevable de cette somme dans la limite des montants totaux perçus depuis le début du contrat au titre du complément de rémunération, est redevable de l’intégralité de cette somme pour l’énergie produite entre le 1er janvier et le 31 décembre 2022 inclus

La mesure est justifiée, dans l’exposé des motifs, par le caractère inattendu de la hausse durable des tarifs de l’électricité et donc par « des prix de marché de l’électricité particulièrement élevés qui n’avaient pas été anticipés lors du montage financier des projets ».

Surtout, l’objectif de chasse aux surprofits des producteurs n’est pas masqué et il est ainsi assumé qu’il s’agit de faire en sorte que le soutien accordé aux producteurs d’énergie renouvelable ne conduise pas à ce que « la rémunération totale des capitaux immobilisés, résultant du cumul de toutes les recettes de l’installation et des aides financières ou fiscales octroyées au titre de celle-ci, excède une rentabilité raisonnable des capitaux compte tenu des risques inhérents à son exploitation ».

L’exposé des motifs est en revanche silencieux sur une éventuelle atteinte au principe de sécurité juridique ou encore sur le droit des producteurs au maintien des conventions légalement conclues. Car, en effet, ce projet a un effet rétroactif non seulement en ce qu’il s’applique aux contrats en cours mais également en ce qu’il s’applique à une période déjà passée, depuis le 1er janvier 2022. Il ne serait, d’ailleurs, pas surprenant qu’une pérennisation de cette disposition soit proposée prochainement (pour l’année 2023 et les suivantes).

Si le législateur devait confirmer cette orientation en adoptant le PLFR en l’état, il resterait toujours la possibilité que le Conseil constitutionnel soit saisi de la question. Une telle démarche ne devra toutefois pas susciter des espoirs démesurés compte tenu du récent précèdent en matière de modification des tarifs dans la filière solaire (cf. Clap de fin !). Affaire à suivre…

Call To Action Arrow Image

Latest insights in your inbox

Subscribe to newsletters on topics relevant to you.

Subscribe
Subscribe

Related Insights

Droit public et Education

Les contrats de la commande publique touchés par les sanctions contre la Russie

22 avril 2022
Briefing

par Sophie Pignon

Cliquer ici pour en savoir plus
Droit public et Education

Hausse du coût des matières premières et de l’énergie liée aux crises successives, du Covid-19 à la guerre en Ukraine : quels impacts sur les contrats publics ?

12 avril 2022
In-depth analysis

par Sophie Pignon

Cliquer ici pour en savoir plus
Droit public et Education

Marché public de travaux et responsabilité horizontale

15 mars 2022
In-depth analysis

par Sophie Pignon et Pr. Stéphane Braconnier

Cliquer ici pour en savoir plus