8 février 2019
Une offre publique d’acquisition (OPA) lancée sur une société étrangère doit donner lieu à information et consultation du Comité d’entreprise au sein de sa filiale française.
Telle est la position prise par la Cour de Cassation en décembre 2018 dans le cadre de l’OPA lancée par Thales sur la société de droit néerlandais Gemalto NV en 2017.
La position est nuancée : en l’absence de Comité d’entreprise européen précisant les modalités de consultation à la fois de l’instance européenne et des instances nationales, la société contrôlée par une société mère étrangère doit être consultée sur tout projet concernant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise, notamment sur les mesures à affecter le volume et la structure des effectifs résultants des modifications de l’organisation économique et juridique de l’entreprise, y compris lorsqu’une offre publique d’acquisition porte sur les titres de la société mère.
Cette décision résulte des dispositions françaises et européennes établissant un cadre général relatif à l’information et à la consultation des travailleurs dans la communauté européenne. Il s’ensuit que le comité d’entreprise d’une filiale susceptible d’être affectée -tout au moins indirectement- par l’OPA lancée sur sa mère étrangère est fondée à demander, s’il le faut en référé, des informations sur l’OPA au regard des incidences sur l’emploi de ses salariés.
Si la solution n’est pas surprenante en tant que telle, dans la mesure où la situation de l’emploi en France était susceptible d’être « affectée » par l’opération en question, les motifs avancés par la Cour de Cassation interpellent quelque peu.
En effet, c’est l’absence des règles régissant l’articulation de la consultation du Comité d’entreprise européen et des Comités d’entreprises nationaux qui semble avoir emporté la décision de la Cour de Cassation.
Pour le dire autrement : En présence d’un comité d’entreprise européen dont le règlement prévoit précisément les conditions d’information et de consultation de l’instance européenne par rapport aux instances nationales de représentation du personnel, l’obligation de consultation est-elle susceptible de descendre au niveau de la filiale ?
On sait que les modalités d’information/ de consultation du Comité d’entreprise européen sont fortement influencées par la loi du pays où il est implanté. Une consultation qui obéit aux exigences du droit français n’est donc pas requise par une grande partie des pays européens.
On pourra donc légitimement s’interroger sur le fait de savoir si l’information (type Anhörung prévue par le droit allemand par exemple) du Comité d’entreprise européen suffira pour éclipser l’obligation de consultation de droit français au sein de la filiale, au moins dans les cas où « l’affection » de la filiale par l’OPA n’est pas directe et immédiate.
par Claudia Jonath
par Claudia Jonath
par Claudia Jonath