22 mai 2020
Obligatoire dans les transports en commun depuis le 11 mai 2020, le port du masque se généralise dans la rue. Lors de son discours du 7 mai dernier, le premier ministre Edouard Philippe a assumé la décision du gouvernement de ne pas rendre obligatoire le port du masque dans l’espace public « Ce n’est pas le choix que nous avons fait (…) lorsque vous vous promenez seul dans la rue ou en campagne, le masque n’a pas d’intérêt immédiat ». N’en déplaise à certains maires qui souhaitaient rendre obligatoire le port du masque sur le territoire de leur commune. La suspension de l’exécution de certains arrêtés municipaux a ainsi été obtenue (notamment à l’initiative de la Ligue des droits de l’Homme) : imposer le port du masque dans l’espace public étant considéré comme une atteinte à la liberté individuelle. On peut penser qu’à défaut de risque propre inhérent à une commune en particulier, cette approche des tribunaux prévaudra. Un décret publié le 11 mai indique toutefois que « les masques doivent être portés systématiquement par tous, dès lors que les règles de distanciation physique ne peuvent être garanties ».
Le protocole national de déconfinement établi par le gouvernement préconise de privilégier les mesures de protection collective, en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelles. Les employeurs doivent donc favoriser les mesures de protection collectives, en particulier les mesures organisationnelles, notamment le télétravail, l’aménagement des horaires et des tâches, la réorganisation des espaces ou du travail, l’installation de barrières de séparation physique et la régulation des flux.
Ce n’est que lorsque l’ensemble de ces précautions n’est pas suffisant pour garantir la protection de la santé et la sécurité des personnes que ces mesures doivent être complétées, en dernier recours, par des mesures de protection individuelles, telles que le port du masque.
Se pose la question de savoir comment déterminer si les précautions mises en place par l’employeur sont suffisantes.
Si le gouvernement a explicité de façon détaillée dans son protocole de déconfinement, le critère d’occupation maximale des espaces ouverts au public et en milieu de travail (via une « jauge »), cela n’est pas le cas pour la gestion des flux des salariés.
Le protocole précise par ailleurs que lorsque certaines situations comportent un risque non maitrisable de rupture accidentelle de la distanciation physique (y compris par l’usager / le salarié lui-même), des mesures complémentaires, comme le port du masque grand public, sont à mettre en place.
Ainsi, en cas d’impossibilité de mise en place des mesures de distanciation suffisante ou d’incertitude quant au bon respect des mesures de sécurité, il nous semble souhaitable d’imposer le port du masque, et ce notamment pour limiter le risque de condamnation pénale et de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur. En effet, il ne peut être exclu que les juges, considèrent le masque comme un équipement de protection individuelle, à l’image des lunettes de sécurité et des casques.
Hors professionnels de santé, le gouvernement préconise la fourniture de masques FFP1 ou des masques alternatifs à usage non sanitaires, dit « grand public ». Pour compenser l’inconfort ressenti en raison du port régulier du masque et en prévision des périodes de grande chaleur, l’employeur sera bien avisé de sensibiliser ses salariés à une hydratation suffisante, notamment dans les entreprises où la climatisation est coupée pour limiter la circulation du virus.
Afin de rendre la mesure obligatoire, l’employeur devra modifier son règlement intérieur ou rédiger une note de service (considérée alors comme une adjonction au règlement intérieur). Le respect de la procédure inhérente à la modification du règlement intérieur devra alors être respectée : définir la date d’entrée en vigueur de la nouvelle mesure, informer et consulter (le cas échéant) le CSE, communiquer le document à l’inspection du travail et respecter les formalités légales de dépôt et de publicité.
A notre sens, compte tenu de la situation d’urgence sanitaire, il pourrait toutefois être envisagé de prévoir une application immédiate de l’obligation du port du masque au sein de l’entreprise. Dans ce cas, les procédures d’information consultation du CSE et de communication à l’inspection du travail devront être réalisées immédiatement et simultanément à l’instauration de l’obligation du port du masque. En pratique, il conviendra par ailleurs de communiquer largement sur cette nouvelle obligation, par voie d’affichage et/ou via l’envoi d’emails à l’ensemble des salariés de l’entreprise. Enfin, la mise à jour du document unique d’évaluation des risques devra être réalisée.
par Claudia Jonath
par Claudia Jonath
par Claudia Jonath