2 avril 2020
Le nouveau défi du Coronavirus SARS-CoV-2 soulève de nombreuses questions en matière de droit du travail. Nous avons compilé pour vous les questions les plus importantes du point de vue de l’entreprise. En droit du travail, la prudence est toutefois de mise car la solution dépend toujours du cas d'espèce. Le conseil juridique est tout aussi important pour lutter contre le virus qu'une bonne hygiène des mains. La présente FAQ ne remplace pas un examen juridique au cas par cas et ne constitue pas un conseil juridique.
La prudence est de rigueur. Les membres de notre équipe de travail Claudia Jonath, Markus Asshoff, Mounira Freih, Tiphaine Puzin et Julie Filliard se tiennent à votre disposition.
L'employeur est tenu de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la santé et la sécurité de ses salariés. L'employeur doit suivre les recommandations du Gouvernement, notamment pour réduire le risque d'être tenu responsable si un salarié est infecté par le coronavirus
De plus, en suivant les recommandations du Gouvernement, l'employeur limitera le nombre de situations où ses salariés pourraient faire usage de leur droit de retrait (tel que décrit ci-après).
L'employeur peut également se référer à la FAQ publiée en ligne par le Ministère du travail.
Le salarié doit prendre soin de sa santé et assurer sa sécurité ainsi que de celles de ses collègues. Par conséquent, et plus particulièrement s’il doit continuer à travailler au sein des locaux de l’entreprise, le salarié doit informer son employeur s'il a été en contact avec une personne contaminée ou s’il présente des symptômes du Coronavirus. En revanche, le salarié n'a pas besoin d'informer l'employeur de la situation de ses proches sauf à ce qu’il soit un « cas contact », c’est-à-dire qu’il a été en contact avec un « cas confirmé ».
Non. Le Code du travail ne prévoit pas de droit général à poser des questions sur l’état de santé du salarié. La prudence est recommandée en ce qui concerne la protection des données personnelles sensibles des salariés. L’employeur ne peut pas collecter des informations sur leur état de santé par des fiches et questionnaires médicaux. En revanche, l’employeur peut sensibiliser et inviter ses salariés à effectuer des remontées individuelles d’information les concernant en lien avec une éventuelle exposition, auprès de lui ou des autorités sanitaires compétentes.
En cas de suspicion légitime d’infection, l'employeur doit inciter le salarié à se référer aux recommandations gouvernementales.
Non. Si un salarié n'est pas malade et si l'employeur a mis en œuvre toutes les recommandations gouvernementales concernant le Coronavirus, le salarié doit travailler (en télétravail quand celui-ci est possible). Le risque d'infection possible, par exemple dans les transports en commun, ne permet pas au salarié de refuser d’exécuter son travail.
Toutefois, un salarié bénéficie d’un droit de retrait lui permettant de se retirer d'une situation de travail lorsqu’il a un motif raisonnable de croire qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé. Il doit immédiatement alerter l'employeur de cette situation. Il s’agit d’un droit individuel et subjectif de sorte que, en cas de désaccord avec l’employeur concernant l’existence d’un danger grave et imminent, seul le juge peut décider si le retrait du salarié est ou non justifié.
Non. Cependant, l'employeur est désormais tenu d’annuler tous les déplacements non impératifs. Si le déplacement ou le détachement est impératif, l'employeur doit se référer aux recommandations du Gouvernement et s'assurer que le salarié les respecte. Dans ce cas, le salarié ne peut refuser le voyage ou le détachement que s'il a un motif raisonnable de croire qu'il représente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé (comme expliqué ci-dessus) et si l'employeur n'a pas mis en œuvre les recommandations de sécurité émises par le Gouvernement.
L’employeur est tenu par une obligation générale de protéger la santé et la sécurité des salariés. Si un salarié est détaché à l’étranger ou dans une zone à risque, l’employeur doit appliquer toutes les recommandations gouvernementales et le rapatrier en France si cela apparaît nécessaire pour protéger sa santé et sa sécurité.
Seulement si ces réunions et salons sont indispensables. Dans cette hypothèse, le salarié ne peut refuser de participer à des réunions ou à des salons que s'il a un motif raisonnable de penser que cela représente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé (comme expliqué ci-dessus), et si l'employeur n'a pas mis en œuvre les recommandations de sécurité émises par le Gouvernement.
Non. Si l'employeur a mis en œuvre les recommandations émises par le Gouvernement, les conditions relatives au droit de retrait ne sont normalement pas réunies.
L’employeur ne peut prendre aucune sanction ni effectuer de retenue sur salaire en raison de l’inexécution du contrat de travail.
En raison de son obligation de santé et de sécurité, l'employeur doit rappeler et diffuser toutes les recommandations sanitaires auprès de tous les salariés.
Il doit également reporter les déplacements non impératifs.
Il doit également mettre à jour son Document Unique d’Evaluation des Risques (DUER) après avoir informé et consulté son Comité Economique et Social (CSE). Cette mise à jour doit couvrir les risques nouveaux générés par le fonctionnement dégradé de l’entreprise (aménagement des locaux, réorganisation du travail, affectation sur un nouveau poste de travail, télétravail, etc) ainsi que ceux liés à l’exposition au coronavirus.
Non, s'il n'est pas malade. Le masque est réservé aux patients sur prescription médicale, aux contacts à haut risque et aux professionnels de santé.
Le Gouvernement demande à chacun de suivre certains gestes « barrière » : se laver les mains très régulièrement, tousser ou éternuer dans son coude, saluer sans se serrer la main, éviter les accolades et utiliser des mouchoirs jetables.
Le salarié et l'employeur ont respectivement le droit de demander un examen médical du salarié par le médecin du travail.
Si le salarié, infecté par le coronavirus, est en arrêt maladie pendant au moins 30 jours, il doit bénéficier, à son retour, d’une visite de reprise par le médecin du travail.
Une obligation générale de sécurité et de santé pèse sur l’employeur. Si le salarié ne bénéficie pas d'un arrêt maladie de l'ARS, l'employeur peut notamment décider unilatéralement de :
L'employeur peut également solliciter des recommandations auprès du médecin du travail.
Oui. Le Gouvernement demande même aux employeurs de mettre en place le télétravail dès lors que celui-ci est possible. Le télétravail est aujourd’hui la norme.
En effet, en cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d'épidémie, la mise en place du télétravail peut être considérée comme une adaptation du poste de travail rendue nécessaire pour permettre la continuité de l'activité de l'entreprise et garantir la protection des salariés.
Dans ce cas, la mise en place du télétravail ne nécessite aucun formalisme particulier.
Pour les salariés occupant des postes où le télétravail n’est pas possible, l'employeur peut dispenser d’activité les salariés. Dans ce cas, leur rémunération sera maintenue.
Le salarié ne peut pas exiger le télétravail, ni de manière générale, ni en cas d'épidémie, mais il peut demander à l'employeur d’en bénéficier. Si l'employeur refuse, celui-ci doit justifier sa décision.
L'employeur peut mettre en place le télétravail ou dispenser le salarié d’activité (avec maintien de la rémunération), ou encore prendre des mesures en vue de la prise ou la modification de jours de congés payés, de jours de RTT ou de jours de repos (dans les conditions et limites décrites ci-après).
Si aucune solution ne peut être mise en place, le salarié peut solliciter auprès de son employeur un arrêt maladie. Dans ce cas, le salarié percevra les indemnités journalières de sécurité sociale sans aucun délai de carence (voir ci-après).
Si cela semble justifié, et lorsque le salarié ne bénéficie pas d'un arrêt maladie et que le télétravail n’est pas possible, l'employeur peut le dispenser de travailler. Dans ce cas, la période pendant laquelle le salarié est dispensé est considérée comme une période normalement travaillée et l'employeur est tenu de maintenir sa rémunération.
S’agissant des congés payés, l’employeur peut imposer au salarié de prendre des congés payés ou modifier leur date (dans la limite de 6 jours à poser d’ici le 31 décembre 2020), ou encore fractionner les congés sans l’accord du salarié, à la condition qu’un accord d’entreprise ou un accord de branche l’y autorise et sous réserve de respecter un délai de prévenance d’au moins un jour franc. La portée de l’ordonnance du 26 mars 2020 manque encore de clarté à ce jour mais il semblerait que, du fait des circonstances exceptionnelles actuelles, l’employeur puisse toujours modifier unilatéralement la date de congés payés déjà posés (sans avoir à respecter un délai de prévenance d’un mois) à la condition de ne procéder à aucun fractionnement (article L. 3141-16 du Code du travail).
S’agissant des jours de repos (jours de RTT, jours de repos notamment en cas de forfait annuel en jours), l’employeur peut unilatéralement imposer au salarié de prendre des jours de repos ou modifier la date de ceux déjà posés (dans la limite de 10 jours à poser d’ici le 31 décembre 2020), sous réserve de respecter un délai de prévenance d’au moins un jour franc.
De même, l’employeur peut unilatéralement imposer que les droits affectés sur le Compte Epargne-Temps (CET) du salarié soient utilisés par la prise de jours de repos (dans la limite de 10 jours à poser d’ici le 31 décembre 2020), dont l’employeur détermine les dates sous réserve de respecter un délai de prévenance d’au moins un jour franc.
La limite de 10 jours précitée vaut de manière cumulative pour tous les jours de repos pris (jours de RTT, jours de repos, jours pris sur le CET).
Si un salarié présente des symptômes du coronavirus, l'employeur doit se référer aux recommandations gouvernementales et inviter le salarié à faire de même.
S'il existe un risque sérieux de contamination, l'employeur doit inviter le salarié à contacter son médecin de traitant. En cas de symptômes graves, l’employeur doit appeler les services d'urgence (le 15).
Si un salarié est infecté par le coronavirus, l'employeur doit suivre les recommandations émises par le Gouvernement, c'est-à-dire :
Concernant l’entretien des sols, l’employeur doit :
En principe, l'employeur supporte le risque de ne pouvoir maintenir l’activité de l’entreprise en raison de l’absence de main d’œuvre. Cependant, l'employeur peut prendre diverses mesures pour minimiser ce risque économique, telles que recourir à l’activité partielle, aménager le temps de travail (par exemple par la réalisation d’heures supplémentaires, des exceptions aux durées maximales légales de travail et aux temps de repos, etc).
Le dispositif d’activité partielle peut être sollicité par les entreprises dans le cadre de circonstances à caractère exceptionnel, telles que les circonstances actuelles liées au Coronavirus. Toutefois, la demande doit être validée par l’Administration au regard des raisons invoquées par l’employeur (ex : baisse d’activité, absence massive de salariés indispensables à l’activité de l’entreprise, etc.).
Cette demande d’activité partielle doit être effectuée en ligne et adressée dans un délai maximum de 30 jours suivant la mise en place effective de l’activité partielle au sein de l’entreprise (valable pour les activités partielles mises en place depuis le 1er mars 2020).
La demande doit en principe être accompagnée de l’avis du Comité social et économique (CSE) rendu à l’égard de cette demande. En effet, le CSE doit être informé et consulté préalablement à la demande d’activité partielle auprès de l’Administration. Toutefois, en cas de circonstances exceptionnelles (comme actuellement), l’employeur bénéficie d’un délai de 2 mois, suivant sa demande d’activité partielle, pour consulter son CSE et adresser l’avis rendu à l’Administration. Dans ce cas, la date prévue pour la consultation du CSE doit être indiquée dans la demande d’activité partielle ; ce qui supposerait de convoquer d’ores-et-déjà le CSE en vue de cette réunion.
L’Administration dispose d’un délai de 2 jours pour accepter ou refuser la demande d’activité partielle ; l’absence de réponse valant acceptation.
Si le dossier d’activité partielle est validé par l’Administration, l’employeur verse au salarié une indemnité égale à 70% de son salaire brut (calculé sur la même base que l’indemnité de congés payés). L’employeur peut décider d’octroyer une indemnité supérieure mais la part excédant l’indemnité légale ne sera pas remboursée par l’Etat.
En effet, en contrepartie, l’employeur recevra une allocation de la part de l’Etat qui sera égale à 100% de l’indemnité légale versée aux salariés (dans la limite de 70% de 4,5 fois le SMIC horaire brut (soit environ 4 850 euros) et sur la base d’une durée du travail de 35 heures par semaine maximum).
L’indemnité versée aux salariés n’est pas soumise à cotisations sociales mais uniquement à la CSG et à la CRDS.
La durée maximale de bénéfice du dispositif est de 12 mois.
Le Comité social et économique (« CSE ») est associé à l'organisation, à la gestion et à la direction générale de la société. À ce titre, il doit notamment être informé et consulté sur les modifications importantes intéressant la santé, la sécurité ou les conditions de travail des salariés.
Ainsi, avant tout changement important dans l'organisation du travail, le recours à l’activité partielle ou encore l'aménagement du temps de travail et des temps de repos, l'employeur est tenu d'informer et consulter le CSE (si possible par visioconférence). Il doit également être informé et consulté sur la mise à jour du Document Unique d’Evaluation des Risques (DUER).
Le CSE peut également prendre l'initiative de demander l'organisation d'une réunion exceptionnelle.
En outre, en cas de danger grave et imminent pour les salariés, le CSE peut alerter l'employeur. Dans ce cas, l'employeur doit immédiatement mener une enquête avec le représentant du CSE et prendre les mesures nécessaires pour remédier à la situation.
Comme l'employeur est tenu d'assurer la protection de la santé et de la sécurité de ses salariés, il est obligé de prévenir le harcèlement et la discrimination. L'employeur doit veiller à ce que le personnel n'exclue pas les collègues qui, par exemple, proviennent de zones à risque ou peuvent avoir des contacts avec des collègues.
En cas de harcèlement ou de discrimination de ces salariés, l'employeur doit prendre toutes les mesures nécessaires pour évaluer la situation et y mettre fin si elle apparaît avérée (c'est-à-dire prendre connaissance des faits décrits par le salarié concerné, procéder à une enquête interne, prendre des mesures (éventuellement disciplinaires)).
Oui. Si un salarié est en arrêt maladie ou en quarantaine à cause du Coronavirus (avec un arrêt délivré par l'ARS), il recevra des indemnités journalières de sécurité sociale comme pour tout autre type d’arrêt maladie, mais sans application du délai de carence. Un complément de rémunération de la part de l’employeur peut également exister si les conditions prévues par la loi (mais allégées en la période actuelle, avec notamment la suppression de la condition d’ancienneté) et/ou les conditions des règles internes sont remplies (comme pour tout arrêt maladie).
Le salarié est couvert par l'assurance maladie.
La prudence est recommandée en ce qui concerne la protection des données personnelles sensibles des salariés. L’employeur ne doit pas porter atteinte au respect de la vie privée de ses salariés. De ce fait, il ne peut instaurer des relevés obligatoires de température, ni collecter des informations sur leur état de santé par des fiches et questionnaires médicaux.
En cas de signalement, un employeur a le droit de consigner certaines informations telles que la date et l’identité de la personne suspectée d’avoir été exposée au virus, ainsi que les mesures organisationnelles prises (quarantaine, télétravail, orientation et prise de contact avec le médecin du travail, etc.).
La CNIL a émis en ce sens un certain nombre de recommandations le 6 mars 2020.
L'employeur supporte les coûts de la santé et la sécurité au travail. Cela s'applique également aux changements d’horaires ou à la mise en place de postes de télétravail adaptés.
par Claudia Jonath
par Claudia Jonath
par Claudia Jonath