Auteur

Manuela Dachauer

Collaborateur senior

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10 septembre 2018

La nouvelle obligation de transparence des salaires en Allemagne (« Entgelttransparenzgesetz »)

Le 6 janvier 2018, est entré en vigueur le dispositif permettant aux salariés de comparer leurs salaires, issu de la loi allemande sur la transparence des salaires (« Entgelttransparenzgesetz »). Celle-ci a vocation à lutter contre l’inégalité salariale entre les hommes et les femmes.

Cette loi s’inscrit dans une tendance générale de prise de conscience des discriminations hommes-femmes. En effet, en 2015, l’office statistique de l’Union européenne Eurostat notait une différence globale moyenne du revenu horaire brut entre les hommes et les femmes de 16,3 % au sein de l’Union européenne.

L’Islande, précurseur dans la lutte contre les inégalités hommes-femmes

L’Islande, déjà pionnière de l’égalité hommes-femmes, a réalisé une avancée par une loi entrée en vigueur le 1er janvier 2018. Celle-ci oblige les entreprises et les administrations comptant plus de 25 salariés à rémunérer autant les hommes et les femmes de compétences égales travaillant autant.

Pour assurer l’effectivité de la loi, des contrôles et des sanctions pécuniaires ont été prévus. Un certificat de conformité valable trois ans sera délivré aux structures respectant la nouvelle obligation par un organisme indépendant. Les entreprises qui ne la respecteront pas pourront se voir infliger une amende pouvant aller jusqu’à 400 euros par jour. L’Islande devient ainsi le premier pays au monde à sanctionner les entreprises en raison d’inégalités salariales.

La nouvelle loi allemande pour lutter contre les inégalités hommes-femmes («Entgelttransparenzgesetz »)

Pointée du doigt comme étant l’une des mauvaises élèves de l’Union européenne avec une différence de salaire de 21 % entre les hommes et les femmes en 2015 (qui est toutefois de 7 % à fonctions et qualifications égales), l’Allemagne a décidé d’agir.

Même si des dispositions statutaires affirmaient déjà le principe de l’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes, le législateur allemand a réaffirmé sa volonté de lutter contre les inégalités salariales hommes-femmes par la loi sur la transparence des salaires (« Entgelttransparenzgesetz »), entrée en vigueur le 6 juillet 2017.

Cette loi ouvre depuis le 6 janvier 2018 un droit pour tout salarié d’une entreprise employant plus de 200 personnes de demander la moyenne des salaires bruts mensuels de six collègues du sexe opposé ayant des compétences identiques ou comparables aux siennes. La demande doit être formulée par l’employé par écrit en son nom et adressée au comité d’entreprise ou, à défaut, à l’employeur directement. L’employeur dispose en principe d’un délai de trois mois pour répondre au salarié. Si ce dernier ne réagit pas, le salarié pourra porter plainte pour discrimination avec une inversion de la charge de la preuve.

Toutefois si une différence de salaire discriminatoire est constatée, la loi ne prévoit pas d’amende pour l’employeur. L’Allemagne a donc une démarche moins ambitieuse que l’Islande, limitant ainsi l’effectivité de la loi.

Une autre exigence de la loi restreignant son effectivité est l’obligation pour le salarié de trouver au moins six personnes de sexe opposé exerçant le même type de fonctions que lui au sein de l’entreprise. Or, plus l’échelon du salarié est élevé, moins il aura la possibilité de lister six collègues exerçant les mêmes fonctions.

Rappelons enfin que ce droit n’est accessible que pour les employés appartenant à des entreprises de plus de 200 salariés. Cela exclut d’office les salariés travaillant dans de plus petites structures.

Et la France ?

Origine

La lutte contre l’inégalité salariale est ancrée depuis longtemps dans le droit français. La convention n° 100 de l’Organisation internationale du travail, adoptée en 1951, énonçait déjà que « Tout employeur est tenu d’assurer, pour un même travail de valeur égale, l’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes ». Cette convention a été inscrite dans le Code du travail en 1972 et complétée par la loi Roudy de 1983.

Les inégalités en chiffre

Selon l’INSEE, en 2015, la France notait une différence de salaire entre les hommes et les femmes de 18,5 %. Toutefois, à même emploi et même temps de travail, l’écart de salaire est de « seulement » 9 %.

Dernières mesures mises en place

Le Président Emmanuel Macron a fait savoir que l’égalité hommes-femmes serait l’une des grandes causes du quinquennat. Après la publication du baromètre annuel Ethics and Boards (classement des 120 grandes entreprises respectant l’égalité salariale), la secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes Marlène Schiappa a convoqué en septembre 2017 les dix entreprises les moins bien classées au ministère pour une demi-journée de sensibilisation à l'égalité professionnelle, selon la pratique du name and shame.

Copier nos voisins : bonne ou mauvaise idée ?

Début 2018, Madame Schiappa a fait savoir que le gouvernement travaillait sur un projet similaire à celui de l’Allemagne.

Cependant certains proposent d’aller plus loin que l’Allemagne en appliquant de véritables sanctions à l’encontre des entreprises qui ne respectent pas l’égalité salariale au lieu de seulement révéler une moyenne des salaires. D’autres s’inquiètent au contraire des difficultés organisationnelles et relationnelles qu’une loi sur le modèle allemand risque d’occasionner (temps passé à justifier les écarts de rémunération, mise à mal de la paix sociale en raison des jalousies que les informations peuvent entraîner).

Conclusion

L’intention de lutter contre les inégalités hommes-femmes, et contre les inégalités de manière générale, est louable. Mais sur quels critères s’appuyer pour déterminer que deux salariés sont dans des situations identiques ou du moins comparables ?Deux salariés titulaires d’un même diplôme décerné par deux établissements ne bénéficiant pas du même positionnement dans les classements (cf. par exemple, les classements des écoles de commerce) peuvent-ils être considérés comme dans des situations comparables ?

La mise en pratique de la loi risque de se heurter à de nombreuses difficultés.

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